Jean-Michel Atlan
Le Kybalion, œuvre phare qui a figuré dans nombre d’expositions de l’artiste, évoquerait volontiers un souvenir d’Afrique du Nord, a pourtant été peint à Paris, dans l’atelier d’Atlan, rue de la Grande Chaumière.
Pendant la guerre, cet artiste autodidacte professeur de philosophie, résistant, et interné à l’hôpital Saint-Anne pendant deux ans pour éviter sa déportation en tant que juif, a développé une œuvre atypique et inclassable. Dans sa peinture se joignent aussi bien les traditions berbères de sa jeunesse en Algérie et la Kabbale que les réminiscences de vieux royaumes disparus. de l’Egypte au Soudan ou à l’Asie, que le geste du peintre actualise.
Si le cerne chorégraphique et sombre nous est familier, de même que ses lumineux aplats de couleurs, il acquiert une ampleur magnifiée par le choix d’un format carré. La figure qui se dessine semble toujours déborder le cadre, comme prise dans un flux vitaliste. Malgré tout, l’artiste nous laisse dans l’ignorance et dans l’imagination de ce qui est en train de prendre vie, forces, énergies combattantes, victorieuses ( ?) où restent secrets les rituels et les pouvoirs magiques qui s’emparent de sa ligne. Au-delà de la forme – ni totalement animal végétal ou humain tant les éléments s’entremêlent- le tableau se fait tautologie d’une réalité qui se dévoile née d’un combat singulier avec la matière, d’une danse.
Le Mam de Paris conserve 4 œuvres de Jean Michel Atlan dont 3 peintures de 1946 à 1955, cette acquisition s’inscrirait parfaitement dans notre projet de compléter et/ou prospecter l’acquisition d’œuvres d’artistes de la collection pour renforcer notre présentation des années 50 et 60 et de la seconde École de Paris à laquelle l’artiste est rattaché. Elle s’intègrerait dans un accrochage collectif, auprès d’œuvres de Hartung, Soulages, Poliakoff, Picabia Par ailleurs, Le Kybalion évoque avec ses résurgences primitives les peintures de Karel Appel (il a exposé aux côtés des membres de CoBRA en 1949) et ferait entrer une autre facette de la peinture d’Atlan encore non représentée au musée. L’œuvre pourrait être incluse dans l’exposition en préparation consacrée aux « modernités arabes ».
Jean-Michel Atlan (1913-1960)
Le Kybalion, 1956
Huile sur toile
100 x 100 cm